« Suis-je la plus belle en ce miroir ? » Il n’y a pas que la marâtre de Blanche-Neige qui pose cette question, ni la Castafiore qui y réponde en chantant l’air de Marguerite du Faust de Gounod (« Ah, je ris de me voir si belle en ce miroir »). L’attirance pour son propre reflet est évidemment présente dès l’Antiquité avec Narcisse, et elle trouve des applications diverses et variées dans le monde de l’érotisme.
Seule ou seul, un individu peut aimer se regarder nu dans sa glace, qu’il se trouve beau ou non, et l’image de sa réalité physique, qu’elle quelle soit, peut déclencher du désir. Envers lui-même, d’abord, puisque ce corps dévoilé (et double) se présente comme s’il était vu par quelqu’un d’autre, qui est en même temps soi et un étranger imaginaire.
De là, un homme ou une femme peuvent se masturber, déclenchant jusqu’à l’orgasme un plaisir voyeuriste et exhibitionniste bien plus que narcissique.
Les cas sont nombreux de personnes n’aimant plus se masturber que devant leur reflet ; une masturbation sans miroir permet de voir son corps pendant la caresse, pas son visage. Or, le visage détaillé dans le miroir est l’élément supplémentaire indispensable : on se regarde jouir, parfois les yeux dans les yeux.
Faire l’amour avec son ou sa partenaire devant une glace procède de la même envie : celle du voyeurisme et de l’exhibitionnisme. Dans le fond, on regarde un film – qui ne laissera aucune trace - dont on est à la fois spectateur et acteur. Souvent l’imagination fait s’introduire un ou plusieurs spectateurs fictifs. Le spectacle recherche (ou procure) des sentiments différents : du côté du narcissisme à deux, une sorte de fierté et de joie à s’observer. D’un côté plus « pervers », le goût de se voir dans des positions obscènes.
D’une manière générale, ce ne sont pas tant les poses et les jeux sexuels qui comptent, ce sont les jeux de regards. Certaines personnes aiment avant tout contempler leur partenaire, d’autres elles-mêmes, d’autres enfin passent de l’un à l’autre. Enfin, on peut se regarder mutuellement dans les yeux par le biais du miroir, et jouir ainsi. Souvent mais pas toujours, les mots accompagnent les images. On peut préférer le cinéma parlant au cinéma muet.
Photos DR Article "Miroir, mon beau miroir" © nouvellestentations.com